« [...] ce n'est qu'en ruminant qu'on s'assimile ce qu'on a lu. » - (Arthur Schopenhauer)

« L'art, c'est se retrouver dans ce que l'on voit ou ce qu'on lit ; c'est quand l'auteur ou le peintre a su formuler mieux que moi ce qui m'arrive ou ce qui m'est arrivé, lorsqu'il l'interprète d'une façon beaucoup plus intelligente que moi, ou quand, grâce à son œuvre, je perçois ma propre vie d'une manière plus fine, plus belle, que moi. » - (Krzysztof Kieślowski)

mardi 14 juillet 2020

Le Dit du Genji, de Murasaki Shikibu : du difficile détachement du monde matériel.

            Le Dit du Genji réussit particulièrement bien sur deux points que je trouve essentiels dans tout bon roman : d’un côté la peinture de personnages individualisés, dont nous comprenons intimement les sentiments, les motivations, les contradictions aussi, et pour lesquels nous ressentons, à défaut de sympathie, au moins une certaine empathie ; de l’autre, la capacité à parler avec justesse des expériences essentielles et universelles de l’existence humaine, à savoir la mort, le temps qui passe, les souffrances liées aux passions humaines ou aux coups brusques, aléatoires, de la Fortune.

          Si Le Dit du Genji est un roman parmi les plus accomplis de la littérature, toutes époques et cultures confondues, c’est qu’il s’agit d’abord et avant tout d’un roman profondément humain qui, malgré la différence parfois considérable des mœurs entre celles d’aujourd’hui et celles de la Cour des Heian au XIe siècle de notre ère, raconte d’abord et avant tout des situations, des sentiments que par-delà nos différences culturelles, raciales, nous avons, êtres humains, tous éprouvé ou éprouverons au cours de notre propre existence. D’où l’étonnante « modern[ité] » de ce roman dont s’émerveille à juste titre René Sieffert, le traducteur français du Genji, et qui fait que je ne me suis guère senti dépaysé malgré la distance culturelle et temporelle importantes, la majeure et redoutable difficulté du roman reposant comme je l’ai déjà dit dans un premier article sur le choix de Murasaki de ne pas nommer directement ses personnages (voir mon article à ce sujet qui devrait grandement faciliter la lecture du roman pour ceux qui nourriraient quelque appréhension à l’aborder). En effet, nous avons davantage l’impression de lire un roman européen du XIXe siècle, et l’art du roman de Murasaki n’est pas sans rappeler celui de Flaubert, dans lequel l’auteur n’intervient guère pour juger directement sur le plan moral ses personnages, se contentant d’exposer comment pense et agit tel personnage, et nous laissant à nous lecteur le soin de juger par nous-mêmes les innombrables êtres peuplant le roman.



2 captures de Kwaidan (Kobayashi, 1964) et 1 du Conte de la Princesse Kaguya (Takahata, 2013) : un aperçu du code vestimentaire à l'époque des Heian, ainsi que des canons de beauté féminine très différents.

Ce préambule posé, Le Dit du Genji se caractérise essentiellement par l’envie récurrente de ses personnages de se détacher du monde matériel dont, au fil des années qui passent, de la vieillesse qui se fait inéluctable, de la mort de leurs proches, ils ressentent avec une acuité croissante les souffrances qui y sont intrinsèquement liées, mais aussi la vanité ultime, et l’extrême difficulté qu’il y a, malgré ce constat qui se fait de plus en plus douloureusement lucide, à s’en détacher, liée principalement aux êtres qui leur sont chers et qui dépendent d’eux. Ce constat désenchanté, amer, sur le monde humain, lieu de perpétuels soucis et souffrances, n’est il est vrai guère novateur, et presque tous les grands romanciers et philosophes parviennent à peu près à une telle conclusion, plus ou moins explicitement, dans leurs œuvres, bien que le degré de désenchantement, de résignation, varient toutefois d’un auteur à l’autre. Pour ce qui est du Genji, cette vision des choses provient surtout de la religion bouddhiste, religion dominante de l’époque, et dont les pratiques et croyances imprègnent fortement celles des personnages : constatation de la vanité ultime du monde, à l’image du jeune Bouddha sortant de son palais, mais aussi, sur un plan plus discutable à titre personnel, la notion de karma, selon laquelle un être mène une succession de vies liées étroitement entre elles, qui peuvent paraître globalement mortifères (nos souffrances seraient liées aux actions mauvaises d’une vie antérieure, ou celles commises dans notre vie présente auraient des répercussions néfastes pour notre vie à venir, l’obsession de cette dernière étant particulièrement prégnante) ou parfois, je trouve, réconfortantes (l’idée notamment qu’un amour  perdure et nous permette de retrouver les êtres qui nous sont chers dans nos vies futures).

Mais là où Le Dit du Genji se distingue d’autres romans aboutissant au même constat pessimiste de la vanité du monde, c’est dans son aspect émotionnel particulièrement poignant : Murasaki aborde, écrit certes abondamment sur le thème de l’impermanence (ou la prise de conscience du caractère éphémère des êtres et choses), thème lancinant qui revient avec insistance tout au long du roman, mais elle le fait avec une émotion poignante, liée à la réussite de la caractérisation des personnages qui nous rend leur mort d’autant plus poignante et saisissante. Le Genji, en tant que personnage principal, est celui qui traversera le plus souvent cette expérience du deuil : c’est à travers elle qu’il prendra conscience, de manière croissante, de la vanité du monde, et sa souffrance ne fera qu’augmenter à mesure que les êtres qu’il perd lui sont plus chers, jusqu’à la perte ultime de la femme qu’il a le plus aimée, Murasaki, qui clôt symboliquement son arc narratif et sa vie, n’ayant plus de raison véritable de vivre, d’autant plus qu’il n’a pas eu d’enfants avec elle.

Voici par exemple le passage de la mort d’Aoi, un des premiers temps forts du roman :
De voir une si belle personne [la femme du Genji, Aoi] à ce point affaiblie et rongée par le mal, étendue là entre la vie et la mort, était un spectacle pitoyable et douloureux. Sa chevelure, répandue sur l’appuie-tête sans que la moindre boucle en fût dérangée, était d’une beauté si parfaite qu’il [le Genji] la contemplait, stupéfait, se demandant quel défaut il avait bien pu lui trouver pendant toutes ces années.
Je vais présenter mes devoirs à l’Empereur Retiré [le père du Genji] et je reviendrai aussitôt. Si j’avais pu vous voir ainsi, sans cérémonie, j’en eusse été fort heureux, mais comme la Princesse [la mère d’Aoi] était sans cesse à vos côtés, je craignais d’être importun et je m’en suis abstenu par une discrétion qui dut vous paraître cruelle. Désormais, tâchez de reprendre courage et regagnez votre place habituelle ! C’est un peu parce qu’elle vous traite comme une enfant que vous vous complaisez dans cet état ! dit-il encore, et quand il la quitta, superbe dans son costume somptueux, de sa couche elle le suivit d’un long regard, plus appuyé que jamais.
Comme c’était le jour où le Conseil devait décider des nominations d’automne, le Ministre [le père d’Aoi] se rendait au Palais, lui aussi, et ses fils, qui espéraient voir leurs efforts récompensées et ne voulaient s’éloigner de lui, tous sortirent à sa suite. La résidence était presque déserte et silencieuse quand soudain la malade, reprise par ses étouffements, se mit à souffrir atrocement. L’on envoya aussitôt au Palais, mais déjà elle ne respirait plus. Tous quittèrent le Palais en hâte, et bien que ce fût la nuit des promotions, ce fut comme si cet accident avait tout ravagé. […] Ce coup fatal, survenant au moment où, soulagés, ils la croyaient sauve, avait frappé de stupeur les habitants de la résidence. De toute part affluaient les messagers envoyés aux nouvelles, mais ils ne trouvaient personne pour les recevoir, dans l’agitation générale, et la douleur des parents offrait un terrible spectacle. Se souvenant que plusieurs fois, sous l’emprise de l’esprit, elle était restée sans connaissance, ils restèrent deux ou trois jours à la veiller, sans même toucher à son appuie-tête, mais comme peu à peu l’aspect du corps se modifiait, ils durent enfin se rendre à l’évidence, au désespoir d’un chacun. À la peine du Sire Général s’ajoutait un autre sujet d’affliction encore, de sorte que, pénétré de la cruelle vanité de ce monde, les condoléances venues des lieux les plus exaltés ne faisaient qu’aviver son ennui. […] On leur conseilla d’essayer des conjurations plus puissantes, et ils les tentèrent toutes dans l’espoir qu’elle pût revenir à la vie, si profond était leur trouble malgré l’altération visible du corps, mais tout était vain et, après quelques jours, en désespoir de cause, on l’emporta à Toribéno, avec les signes d’une douleur extrême. […] Le Ministre, effondré, pleurait, honteux de survivre :
Au terme d’une si longue vie, être précédé dans la mort par une enfant dans la fleur de l’âge, quel crève-cœur ! disait-il, et son entourage le considérait avec affliction.
Tout au long de la nuit se déploya la pompe des cérémonies, mais, vers le point du jour, le Prince se retira, abandonnant à regret la vaine dépouille. Des funérailles sont chose banale certes, mais sans doute parce qu’à l’exception d’une seule fois, il n’en avait guère l’expérience, il en avait été affecté de façon peu commune. C’était passé le vingt du huitième mois, quand le croissant de lune luit à l’aube, et l’aspect du ciel incitait à la mélancolie ; la vue du Ministre, errant dans les ténèbres de son cœur, ajoutait à son affliction ; contemplant le ciel, il murmura :
Je ne sais lequel
est la fumée qui monta
du bûcher funeste
mais la vue de ces nuages
m’emplit de mélancolie
Revenu à la résidence, il ne put trouver le sommeil ; évoquant les souvenirs de toutes ces années, il suivait le fil de ses pensées : comment avait-il pu se dire tranquillement qu’elle finirait bien par le voir d’un œil plus favorable, et par ses intrigues frivoles lui infliger de si cruels tourments. Sa vie durant, et jusqu’à son dernier jour, elle avait pu le tenir pour un être vil et méprisable ! Ainsi se reprochait-il bien des choses, mais tout cela était vain désormais. (p. 248 à 250, livre 9)
Ou encore, plus loin, les derniers instants de Fujitsubo :
L’Impératrice entrée en religion était souffrante depuis le début du printemps ; à la troisième lune son état empira, et l’Empereur [son fils, Reizei] lui rendit visite. Au moment de la disparition de l’Empereur Retiré [son père, Kiritsubo], il était tout enfant encore et ne l’avait donc pas ressentie profondément, mais cette fois il avait un air si affligé que cette Princesse en fut elle aussi tout attristée.
J’ai toujours pensé que cette année-ci me serait fatale, mais comme mes souffrances n’étaient pas trop terribles, je me contenais, car je craignais que si je laissais paraître que je savais ma fin prochaine, l’on ne s’inquiétât de moi plus que de raison ; aussi ai-je à dessein donné moins d’importance que d’ordinaire aux pratiques destinées à assurer mon salut. Je pensais certes me rendre au Palais, afin de m’entretenir paisiblement avec vous des choses du passé, mais trop brefs étaient les répits que me laissaient mon mal, et je voyais à regret s’écouler les jours dans un morne ennui.
Elle parlait d’une voix très faible. Elle était dans sa trente-septième année ; cependant, elle avait encore toute la splendeur de sa jeunesse, et l’Empereur la contemplait avec regret et tristesse. Alors qu’elle était à un âge où certaines précautions s’imposaient, et tandis que lui-même déjà s’inquiétait de ce qu’elle vivait tous ces mois dans un constant abattement, elle n’avait donc eu recours à nulle précaution particulière, se disait-il avec amertume. Et c’était maintenant seulement que, surpris et effrayé, il s’avisait de faire procéder à tous les rites nécessaires. Le Ministre Genji lui aussi était consterné de ce que, des mois durant, l’on n’eût pris garde à ce que l’on avait pris pour une maladie banale. Tenu par l’étiquette, l’Empereur bientôt se retira, dans l’affliction générale. La Princesse, qui souffrait cruellement, ne lui avait fait aucune révélation, mais en son for intérieur, elle ne cessait de remuer mille pensées : altière avait été sa destinée, et sa fortune à nulle autre pareille, et pourtant, elle seule le savait, plus que toute autre elle avait connu de secrets tourments. L’idée que l’Empereur ne se doutait, fût-ce en rêve, de la vérité, la torturait lorsqu’elle le voyait, et elle restait persuadée que ses remords à ce propos suffiraient à faire obstacle à son salut. […]
Je vous sais gré d’avoir, conformément aux ultimes volontés de l’Empereur Retiré, veillé aux intérêts de sa Majesté, mais je regrette amèrement à présent d’avoir attendu placidement qu’une occasion se présentât pour vous exprimer la particulière gratitude que je vous dois !
Ces paroles de la malade, prononcées d’une voix faible, lui étaient parvenues indistinctes : incapable de trouver une réponse, il se mit à pleurer piteusement. Il s’avisa que ceux qui le voyaient, pouvaient se demander pourquoi il était à ce point désemparé, mais la manière d’être qui, toujours, avait été celle de la Princesse, son état qui, même aux plus indifférents, inspirait regret et pitié, voilà qui échappait à la volonté humaine, aussi rien ne pouvait-il la retenir en ce monde, et le sentiment l’envahit que tout était vain désormais.
Encore que je n’eusse guère d’influence, de tout temps j’ai estimé, dans la mesure de mes moyens, devoir veiller sur sa Majesté ; or, déjà par le trépas du Grand Ministre [son beau-père, père d’Aoi] profondément affecté, me voici, quand je vous vois ainsi, jeté dans un trouble tel que j’ai le sentiment qu’il ne me reste plus guère à vivre en ce monde !
Tandis qu’il lui parlait de la sorte, ainsi qu’une lampe qui s’éteint, elle avait cessé de vivre ; alors il s’abandonna aux tourments d’une vaine affliction. […] Le monde entier retentit du bruit des funérailles, et il n’était homme qui n’en fût affligé. Les gens de Cour uniformément ne portaient plus que du noir, et ce fut une fin de printemps sans éclat. […] Le soleil couchant resplendissait, et à l’endroit où se détachait sur le ciel la ramure des arbres de la crête, un mince nuage s’étirait, grisâtre, qui en temps ordinaire n’eût pas retenu son attention, mais qui à cette heure le plongeait dans la mélancolie.
Ce mince nuage
qui s’étire sur la cime
au soleil couchant
sa couleur confondra-t-il
avec ma manche pensive
Mais à quoi bon, puisque nul ne le pouvait entendre ? (p. 459 à 461, livre 19)
               
            L’aspect émotionnel poignant du Dit du Genji ne tient cependant pas uniquement au thème de la mort : Murasaki excelle aussi dans les scènes de séparation entre les êtres chers, que l’on retrouve en particulier dans le cas de la famille d’Akashi : d’abord le départ des femmes pour se rapprocher du Genji, laissant derrière elles le Patriarche, qui se coupera par la suite définitivement du monde en s’isolant dans une montagne difficilement accessible. Ces personnages sont mes préférés de tout le roman (avec Murasaki, le personnage) et l’auteure nous dépeint les difficiles épreuves qu’ils traversent avec une justesse émotionnelle rarement atteinte dans toute la littérature. Enfin, ce qui fait aussi la force émotionnelle exceptionnelle du Genji, ce sont certes les thèmes classiques du temps qui passe, de la mélancolie ressentie vis-à-vis du passé, de la jeunesse d’antan regrettée, mais surtout l’art, la manière dont Murasaki l’aborde, avec d’un côté des personnages dont la vie nous est devenue proche, chère, à mesure que le roman avance (et dont la longueur leur donne une ampleur, une vie, que seul un très long roman parvient à leur conférer), et de l’autre la subtilité et délicatesse dont les personnages ressentent ce passage du temps, par la contemplation de la nature ou la musique, que Murasaki décrit avec un talent poétique magnifique.
Lorsqu’elle [la dame d’Akashi, amante du Genji] comprit qu’elle ne pouvait se dérober et que le départ était imminent, la dame songea avec émotion qu’il lui fallait s’éloigner de ces rivages où tant d’années elle avait vécu, et elle s’affligeait de l’abandon dans lequel se trouverait le Religieux [le père de la dame d’Akashi] qui allait rester là, seul. Pourquoi donc, se disait-elle, lui fallait-il ainsi épuiser la somme de tous les soucis ? Et elle en venait à envier celles sur qui jamais la rosée des faveurs du Prince ne s’était répandue. Ses parents étaient fort satisfaits de l’accueil qu’il lui réservait à la capitale, heureuse fortune qui répondait aux vœux que, des années durant, ils avaient formulé jour et nuit ; le père cependant éprouvait une affliction insoutenable à l’idée qu’il devait vivre désormais sans les voir, et dans son abattement ne faisait que répéter du matin au soir :
Est-il possible que je vive quand je serai privé de la vue de la petite demoiselle [sa petite-fille] ?
Dame la mère de même faisait pitié. Depuis des années ils vivaient séparés, chacun dans sa retraite ; si donc elle restait là, sur qui pourrait-elle s’appuyer ? Il suffit de relations superficielles avec des gens sans conséquence pour créer des habitudes qui rendent pénible l’heure de la séparation, à plus forte raison avait-elle le cœur serré à l’idée de s’éloigner soudain de cet homme avec qui, malgré le peu de confiance qu’inspiraient les bizarreries de son caractère, elle s’était promis de passer le reste de ses jours en ces lieux qui devaient être sa demeure ultime en ce monde. Les jeunes personnes qui trouvaient ce séjour bien monotone à leur gré, étaient heureuses de revenir à la capitale, et pourtant la pensée que jamais sans doute elles ne reverraient ces rivages enchanteurs, mouillait leur manche autant que les vagues qui venaient du large.
C’était en la saison d’automne, qui rendait doublement poignant le départ ; à l’aube du jour dit, un vent frais soufflait, les insectes criaient sans répit ; elle regardait dans la direction de la mer tandis que le Religieux, levé avant matines, faisait ses dévotions en reniflant. […] La petite demoiselle était si belle qu’elle lui semblait le joyau qui illuminait ses nuits […], il se demandait comment il pourrait vivre s’il devait rester, fût-ce un seul instant, sans la voir, et il ne pouvait contenir ses larmes :
Alors que nos routes
vont se séparer je prie
pour son but lointain
mais je ne puis étouffer
les larmes de la vieillesse […]
Dame la nonne répondit :
Ce fut avec vous
que de la Ville je vins
or cette fois-ci
me faudra-t-il donc errer
toute seule par la lande
Pour verser des larmes, elle avait d’excellentes raisons ! Elle songeait à toutes ces années pendant lesquelles elle avait partagé son destin, et à l’idée de retourner dans un monde qu’ils avaient rejeté, en se fiant à d’incertaines promesses, elle en éprouvait la vanité.
La dame enfin :
Un jour en ce monde
de nouveau nous verrons-nous
après ce départ
puisque rien n’est assuré
pourquoi ne point espérer (p. 435 à 437, livre 18)
           
        Pour résumer et poursuivre l’analyse sur le Genji, voici donc un roman avant tout profondément humain, abordant les aspects essentiels de la vie humaine de manière très émouvante, mais humain aussi dans le sens où il nous présente des personnages complexes, emplis de contradictions, au premier rang desquelles leur difficulté à se détacher du monde matériel, bien que tous en éprouvent, à des degrés différents, la vanité ultime. Cette volonté de retrait se manifeste sous plusieurs formes : la principale est l’entrée dans la vie religieuse, symbolisée par la tombée de la chevelure, processus irrémédiable semble-t-il, et qui signifie surtout la fin de tout contact avec le monde extérieur, et en particulier avec les gens qui nous sont proches (bien que certaines exceptions semblent possibles, comme lorsque Suzaku revient pour sa fille, la Princesse Troisième, ou cette dernière qui garde une forme de contact avec son fils, Kaoru) ; l’exil volontaire (comme le cas de la famille d’Akashi ou du prince d'Uji) ; ou de manière plus extrême, le suicide, mais qui est semble-t-il mal vu du point de vue religieux, mais qui sera néanmoins considéré par certains personnages (par la dame d'Akashi, mais surtout par Ukifune, la dernière fille, illégitime, du prince d'Uji) comme la seule issue à leurs tourments incessants.
Ce qui rend le roman d’autant plus passionnant, c’est l’objectivité de l’auteure, qui ne tranche pas définitivement la question de la nécessité du retrait du monde, bien que le ton se fasse résolument plus pessimiste dans la partie d’Uji (les dix derniers chapitres du roman) où, plus que jamais, le monde humain est décrit comme un lieu avant tout de souffrances, peu enviable, que les protagonistes auxquels notre sympathie va perçoivent comme un trouble à leur repos et où ils sont en proie à leurs pulsions sexuelles (pour les hommes) ou la proie du désir masculin (pour les femmes).  
Rester dans le monde signifie donc en définitive aller au-devant de nouvelles souffrances, tourments sans fin, tandis que le monde religieux, bien qu’il semble préférable car délivré des souffrances terrestres, se caractérise néanmoins par l’ennui, la monotonie (ce qui fait inévitablement penser à Schopenhauer, dont la philosophie rappelons-le est fortement inspirée des philosophies bouddhistes et hindouistes), mais aussi, dans le cas du Genji, la séparation avec Murasaki, séparation qu’il ne peut supporter en son for intérieur et qui fait qu’il ne peut se résoudre à une telle extrémité malgré sa lassitude croissante vis-à-vis du monde à mesure qu’il vieillit, et malgré aussi les supplications de cette dernière, qui eût voulu se faire nonne pour mettre fin aux tourments intérieurs qui la rongent.
Cette tension existentielle, résultant d’un côté d’un dégoût croissant vis-à-vis d’un monde perçu comme instable, lieu de souffrances perpétuelles auquel nous aimerions échapper, et de l’autre un certain attachement à ce monde, ne serait-ce que pour les personnes qui nous sont chères, et pour l’amour desquelles nous continuons malgré tout à subir ces souffrances, n’est-elle pas de tout temps une expérience humaine universelle, que nous sommes tôt ou tard amenés à ressentir chacun et chacune d’entre nous ? C’est cette tension, et l’intensité avec laquelle elle est représentée, qui fait la principale qualité et caractéristique du Dit du Genji, en tout cas celle que je retiens principalement de ma première lecture du roman.
Ainsi, le Genji est incapable de renoncer au monde, car il pense sans cesse aux femmes dont il a en quelque sorte la charge, et qui seraient démunies pour la majorité d’entre elles sans sa protection. Mais surtout l’obstacle majeur et principal, au final, s’avère être son incapacité à se détacher de Murasaki, qui prouve concomitamment le grand amour qu’il lui attache, et la mort de cette dernière aura d’ailleurs par conséquence la mort du Genji, nonobstant les femmes qui lui survivront, Genji ayant en quelque sorte perdu sa raison de vivre avec la mort de celle qu’il a le plus aimée. Le Dit du Genji est à ce sens une des plus belles histoires d’amour jamais écrites, d’autant plus belle sans doute par le côté tragique de cet amour, qui ne connaîtra guère de repos, entre un Genji libertin, dont le désir se porte sur toute femme excitant sa curiosité, mais qui au final lui serviront de comparatif constant avec Murasaki, lui rappelant au final à quel point elle se distingue de ses rivales par ses qualités incomparables, et une Murasaki qui doute par intermittences de l’amour que le Genji lui porte au gré de ses infidélités, bien qu’elle sache qu’elle occupe dans son esprit la première place, mais dont elle redoute la déchéance, par l’action conjointe de sa propre vieillesse et de la jeunesse de ses rivales. Les tourments, souffrances, de Murasaki sont d’autant plus poignantes qu’elle s’ingénie à les minimiser, à ne pas les faire voir à celui qu’elle aime, bien que ce dernier devine, çà et là, les souffrances qu’il lui inflige et se les reproche amèrement à lui-même.
Voici par exemple le Genji, « forcé » de passer la nuit avec sa dernière concubine qui lui a été imposée presque de force par son demi-frère, l’Empereur Retiré Suzuku, la Princesse Troisième, et qui se tourmente de ce qu’en pensera Murasaki, qui lui cache sa souffrance intérieure du mieux qu’elle peut :
Pour cette nuit seulement, veuillez me pardonner, car je dois observer la coutume. Si par la suite il devait m’arriver de vous manquer encore, croyez bien que ce serait à mon corps défendant. Cela dit, d’un autre côté, si l’Empereur Retiré venait à avoir vent de quelque chose…, dit-il, et les sentiments mêlés qui agitaient son cœur paraissaient le faire souffrir.
Elle eut un léger sourire :
Quand vous-même me semblez incapable d’en décider franchement, comment pourrais-je, moi, à plus forte raison, trancher de je ne sais quelle coutume à observer ? dit-elle.
Et comme elle avait ainsi coupé court, jugeant apparemment inutile de poursuivre sur ce ton, confus et perplexe, il restait là, étendu, la tête appuyée sur la main ; elle attira à elle l’écritoire :
Ce monde pourtant
qui sans cesse sous nos yeux
change et se transforme
j’avais cru pour l’avenir
pouvoir lui faire confiance
[…] quand il le lut, encore que les vers fussent des plus plats, il se dit qu’en effet c’était raison :
Le fil de nos jours
peut se rompre à tout instant
mais ce qui nous lie
de ce monde impermanent
jamais ne suivra le sort
comme il ne pouvait se résoudre à se rendre là-bas, et qu’elle l’en pressait, lui faisant observer l’inconvenance qu’il y aurait à être en retard, il s’en alla, superbe dans son costume de soie souple qui répandait un parfum indiciblement suave ; et ce n’était certes point d’un cœur léger qu’elle le suivait du regard.
Pendant des années, elle avait vécu dans l’appréhension d’une pareille mésaventure, et c’était maintenant, alors que, imaginant tout danger écarté, elle se croyait enfin à l’abri, qu’était survenu cet accident qui faisait l’objet de tous les racontars. Et de constater que, décidément, rien n’était assuré en ce monde, lui inspirait désormais de nouvelles craintes pour l’avenir. Or, cependant qu’elle s’efforçait de donner le change en demeurant impassible, les femmes qui la servaient ne cessaient de cancaner entre elles : […]
Elle, toutefois, faisant mine d’ignorer ces récriminations et restait jusque tard dans la nuit à bavarder gaiement avec les femmes ; il lui déplaisait, en effet, que celles-ci fissent tant de bruit autour de cette affaire. […] si, contrairement à sa coutume, elle restait tard à veiller, ses femmes s’en étonneraient, lui susurrait le démon qui est au cœur ; elle entra donc dans son alcôve et revêtit ses effets de nuit, mais, en vérité, la tristesse de toutes ces nuits qu’elle passait solitaire l’accablait de plus belle ; au souvenir toutefois du temps de leur séparation, quand il se trouvait à Suma, elle se raisonnait : la seule chose qui lui importait alors était de savoir qu’il était toujours de ce monde, fût-il éloigné d’elle, et elle ne désolait et ne s’affligeait que pour lui, jusqu’à en oublier ses propres soucis ; que si, en cette occurrence, elle ou lui avait perdu la vie, leur histoire se fût arrêtée là… Le vent soufflait et la nuit était froide, et comme elle ne trouvait le sommeil, craignant que les femmes étendues près d’elle ne s’en étonnassent, elle n’osait remuer, ce qui ajoutait encore à son malaise. Le chant d’un coq s’éleva au cœur de la nuit, mélancolique. (p. 748 à 750, livre 34)
Le Genji, bien que préférant Murasaki à toute autre, ne peut s’empêcher cependant de céder de temps à autre à son impétueux libertinage, ce qui blesse profondément celle qu’il aime. Dans le même temps, la sincérité de son amour est véritable, comme en témoigne la déclaration d’amour touchante de simplicité qu’il lui fait, peu avant qu’elle ne tombe malade :
Elle avait caché sous son écritoire des exercices d’écriture qu’elle avait tracés d’une main dégagée, mais, les ayant découverts, il les retourna et y jeta un coup d’œil. Elle avait écrit sans recherche délibérée, d’une main sûre et fort agréable ; entre autres, un poème avait retenu son attention :
Automne déjà
serait-il si près de moi
puisque sous mes yeux
la montagne au vert feuillage
a changé de couleur
À côté, il s’amusa à griffonner celui-ci :
De l’oiseau d’eau
les couleurs d’un vert plumage
ne sont altérées
même si du lespédèze
l’apparence n’est plus la même
Qu’elle s’ingéniât, quel qu’en fût le propos, à effacer, comme si de rien n’était, la trace des soucis que malgré elle il devinait à son air, la lui rendait plus chère et plus émouvante encore. Ce soir-là pourtant, comme il alla être libre des deux côtés, il s’inventa une raison impérieuse de se rendre sur les lieux de sa discrète équipée. La chose était parfaitement inconvenante, et il s’adressa de vifs reproches, mais ne parvint point à s’en dissuader. (p. 762, livre 34)
Ah, si vous pouviez enfin accéder à la requête [celle de devenir nonne] que naguère je vous ai soumise…
Voilà qui m’est proprement impossible ! De quoi me servirait-il, en ce cas, de vivre plus longtemps, séparé que je serais de vous pour toujours ? C’est une vie banale et sans relief que je mène à vos côtés, mais rien ne saurait passer la simple la joie que j’éprouve à la mener ainsi près de vous, la nuit et le jour. Et je voudrais que, jusqu’au bout, vous prissiez la mesure de mon indéfectible affection, dit-il seulement.
De constater qu’il n’en démordrait point, elle avait le cœur serré, et, voyant avec émotion ses yeux embués de larmes, il s’empressa de parler d’autre chose. (p. 825, livre 35)
Enfin, le dernier point qui me semble primordial dans le Genji est la fragilité, l’inconstance de la condition humaine, soit par les coups du sort (ou de la Fortune), soit par la propre inconstance de l’homme. Cet aspect est surtout prégnant en ce qui concerne les femmes du roman, qui sont au final le véritable cœur du roman. Ce sont en effet leurs tourments, leurs souffrances, qui sont les mieux représentées dans le détail, les plus poignantes aussi, en raison de leur position dans la société les rendant extrêmement dépendantes des hommes, dépendance d’autant plus précaire que le cœur de l’homme est peint dans sa brutalité et dans son extrême versatilité. Ce dernier aspect était certes atténué lorsque nous sommes en la présence du Genji, personnage certes versatile, libertin, mais qui au final n’en aimera vraiment qu’une et s’attache à prendre soin de toutes les femmes avec lesquelles il a été en relation intime, et dont la « brutalité » au regard de son insistance face aux femmes qui lui résistent est certes difficilement défendable, mais l’inconvenance du Genji paraît presque dérisoire par rapport aux autres hommes du roman, qui ont beaucoup moins de scrupules que lui pour parvenir à leurs fins, et dont l’attachement est beaucoup plus superficiel que celui reliant le Genji avec toutes ses maîtresses présentes et passées, lui qui voyait en chacune d’elles une beauté, une singularité, qui les rendait dignes de son amour et/ou de sa compassion. Que l’on voit par exemple comment Genji prend soin de Suétsumu-hana, la « laide » princesse de Hitachi, avec qui il restera en contact et qu’il sauve littéralement de la misère et de l’abandon dans lesquels elle était progressivement tombée, alors qu’aucun autre homme sans doute n’y eût davantage prêté attention. Même celles qui lui résisteront jusqu’au bout sont amenées à prendre conscience de la nature exceptionnelle du Genji, qui malgré ses multiples défauts, n’en demeure pas moins un homme bon, compatissant. Quel contraste, quel gouffre même y a-t-il entre les manières du Genji vis-à-vis des femmes, et celles de Yugiri (son propre fils, vis-à-vis de la Princesse Seconde veuve de son meilleur ami de surcroît !), celles de Higekuro (vis-à-vis de Tamakazura), ou celles de Niou, petit-fils du Genji et un des personnages principaux de la partie d’Uji (vis-à-vis d’Ukifune) !
 

2 captures de Kwaidan (Kobayashi, 1964), qui pourraient illustrer l'état de délabrement de la demeure de Suétsumu-hana, dont la description est très imagée.

            Si les hommes sont eux aussi soumis aux coups de la Fortune, à des renversements de situation, tels l’épisode exemplaire de l’exil et de la disgrâce du Genji à Suma, ce sont surtout les femmes qui y sont le plus soumises, et dont la situation est des plus instables : qu’adviendra-t-il d’elles une fois leur protecteur (père, mari, sœur…) décédé ? Les parents en particulier se tourmentent pour leur progéniture féminine, dont ils s’inquiètent de l’absence, ou de la faiblesse, des appuis dont elles disposeront une fois leur mort, ou leur conversion religieuse (qui s’apparente presque à la mort, en tout cas synonyme de mort sociale) survenue. Le lignage, l’entourage dont disposeront tel (c’est le cas notamment du Genji, dont le sort est aussi source de tourments pour son père, à juste titre d’ailleurs) ou telle (les exemples féminins sont innombrables, entre la Princesse Troisième, Fujitsubo, les filles du Prince d’Uji etc.) de leurs enfants est une source de préoccupation constante pour leurs parents, a fortiori lorsqu’il s’agit d’une enfant dont la mère dispose elle-même d’un lignage faible, et dont la mort du père l’expose souvent à la rancune, le ressentiment, ou à l’indifférence des femmes rivales de leur mère biologique. Les codes, les mœurs, pour aggraver le tout, rendent la condition féminine extrêmement difficile et pénible, et rien n’est moins enviable au final qu’être une femme à cette époque, pourrait-on dire : la bienséance voulant qu’il faille répondre à toute lettre bien tournée, l’extrême précaution dont il faut user face aux hommes (en particulier éviter d’être vue par eux, mais aussi la complicité, la duplicité des suivantes qui prennent souvent fait et cause pour l’insistant soupirant), la présomption de culpabilité si les circonstances laissent penser ou présager d’une « légèreté » de la part de la femme (le cas de la Princesse Seconde face à l’insistance de Yugiri)…
            Le Dit du Genji a indubitablement un certain côté féministe engagé, mais de la meilleure sorte : là encore cela tient de l’objectivité dont fait preuve Murasaki, qui n’intervient pas directement dans le roman pour prononcer des jugements, mais qui se contente de représenter les comportements humains, et leur répétition, les échos que nous percevons entre les différentes situations, nous permettent de voir à quel point le rapport de forces est déséquilibré au détriment des femmes, à quel point aussi les hommes jouissent d’une certaine impunité, et à quel degré de souffrances les femmes sont amenées de par le comportement brutal de leurs soupirants.

La Princesse aînée, à plus forte raison, en était troublée : le cœur du Prince était donc bien, comme elle le craignait, changeant autant que l’herbe-de-lune ! Jusque dans sa retraite, il lui était revenu que ces êtres qui avaient nom « hommes » étaient habiles à manier le mensonge ; des récits que lui faisaient de leurs aventures d’autrefois ses femmes, il ressortait qu’ils savaient vous abreuver de belles paroles pour vous faire croire qu’ils vous aimaient quand il n’en était rien, mais elle avait pensé que si, parmi les gens de rang infime, il pouvait en effet s’en trouver pour agir de façon aussi vulgaire, dès lors que l’on avait à faire à des personnages de haute naissance, la crainte de l’opinion devait leur inspirer une salutaire prudence ; or il apparaissait manifestement qu’il n’en était rien. Le feu Prince déjà avait été prévenu contre celui-là dont la frivolité était bien connue, et jamais il n’avait envisagé de l’admettre dans son entourage proche ; le jeune homme toutefois s’était, dans ses lettres, montré si profondément épris en apparence que, malgré qu’elle en eût, elle avait fini par agréer ses visites, ce qui maintenant se révélait désastreux. (p. 1149, livre 46)

4 captures du Conte de la Princesse Kaguya (Takahata, 2013), inspiré du plus ancien conte japonais connu se déroulant à la même époque que le roman, celle des Heian. Les femmes avaient pour coutume de ne pas être vues par les hommes, se tenant à l'écart dans l'ombre, ou leur parlant à travers un écran. 
 
Pour résumer donc, Le Dit du Genji est un roman remarquable, et cela tient de l’exceptionnelle émotion qui s’en dégage par rapport aux souffrances et tourments des personnages, confrontés aux situations, aux dilemmes universels que rencontre l’homme, peu importe l’époque et la culture dans lesquelles il se trouve : la contradiction entre dégoût et attachement au monde, l’expérience douloureuse de la séparation avec les êtres qui nous sont chers, l’expérience aussi de notre propre inconstance et celle des autres. Malgré tout, Le Dit du Genji est aussi drôle par moments (les interventions discrètes et malicieuses de l’auteure elle-même, rappelant sa condition d’écrivain-courtisan, ou tournant en dérision les poèmes écrits par ses protagonistes ; le caractère comique de Suétsumu-hana et de la fille rustique de To no Chujo, au livre 29, p. 640-641 ; 645 à 647), mais surtout nous fait voir la beauté autrement, en particulier dans l’exaltation de celle que l’on trouve dans la nature (la lune et les fleurs en particulier) et les arts (la musique essentiellement comme consolation et exaltation mélancoliques).


2 captures de Gate of Hell (Kinugasa, 1953). La seconde capture représente un koto, cithare à 13 cordes souvent évoquée dans le roman.
 

De haut en bas : une flûte de Koma (komabue), un luth japonais (biwa) et un orgue à sbouche (shô)




De haut en bas, 3 fleurs souvent citées : le corète, la glycine, le deutzie.


Les cerisiers (haut) et pruniers (bas) en fleur.