« [...] ce n'est qu'en ruminant qu'on s'assimile ce qu'on a lu. » - (Arthur Schopenhauer)

« L'art, c'est se retrouver dans ce que l'on voit ou ce qu'on lit ; c'est quand l'auteur ou le peintre a su formuler mieux que moi ce qui m'arrive ou ce qui m'est arrivé, lorsqu'il l'interprète d'une façon beaucoup plus intelligente que moi, ou quand, grâce à son œuvre, je perçois ma propre vie d'une manière plus fine, plus belle, que moi. » - (Krzysztof Kieślowski)

mardi 3 août 2021

Anna Karénine, de Léon Tolstoï : 10 raisons de le lire, bref comparatif avec Le Rêve dans le pavillon rouge de Cao Xueqin.

        Plutôt que de rédiger un essai structuré sur Anna Karénine (que j’abrègerai en AK pour plus de commodité dans le reste de cette note), exercice peu utile puisque tout ou presque a déjà été dit sur le roman de Tolstoï, et en particulier par Vladimir Nabokov dans son admirable étude minutieuse du roman, j’ai listé ci-dessous 10 raisons, illustrées pour la plupart par quelques citations, qui font selon moi d’AK un des plus grands romans :

1/ Parce qu’AK est un livre paradoxalement très facile à lire, car, comme l’a expliqué Vladimir Nabokov dans sa conférence sur ce roman*, Tolstoï parvient à faire coïncider le temps du lecteur avec celui de l’action du roman. Ainsi, Tolstoï alterne avec une fluidité quasi unique dans l’écriture romanesque les descriptions, l’action, les dialogues et les pensées des personnages, donnant l’illusion que nous vivons en temps réel l’action et que nous en percevons dans le même temps les détails les plus infimes mais significatifs. Seul Cao Xueqin parvient à créer une illusion de la vie aussi prégnante que Tolstoï (bien que parfois il fasse des descriptions excessivement détaillées qui cassent quelque peu la fluidité de son récit), à susciter une telle proximité, familiarité avec les personnages du roman que ceux-ci nous apparaissent comme des connaissances, des amis, des personnes de chair et d’os réelles.

Ex : c’est le roman dans son entier qu’il faudrait citer, mais contentons-nous de dire que l’incipit du roman, qui retrace le réveil douloureux de Stépan dans son cabinet de travail, et non dans son lit conjugal dont il a été chassé par son épouse depuis qu’elle a appris son infidélité, puis sa toilette et enfin son petit-déjeuner avant son départ au travail, nous place d’emblée dans cet effet d’immersion et de réalité que cherche à créer Tolstoï.

2/ Les personnages de Tolstoï sont parmi les plus approfondis de la littérature. Omniscient, Tolstoï parvient à nous restituer leur manière de penser, de voir les choses, le monde, mais également et surtout, parvient à déceler jusqu’aux moindres motifs inconscients de leurs actions. On parvient en tant que lecteur à mieux connaître les personnages qu’eux-mêmes pour ainsi dire, et mieux que n’importe quelle personne vivante que nous côtoyons ou côtoierons jamais dans la vie quotidienne. Deux moments, parmi tant d’autres, illustrent ce fait : le malaise qui ronge Kitty lorsqu’elle refuse la première demande en mariage de Lévine puis lors sa « maladie » consécutive à l’échec de fiançailles éventuelles avec Vronskï s’explique par son amour véritable pour Lévine et son sentiment de culpabilité dont elle a peu conscience elle-même. Ou songeons à Anna qui montre malgré elle tous les signes d’un amour naissant pour Vronskï, que ce dernier perçoit malgré tout, bien que son attitude extérieure et ses paroles semblent aller à l’encontre d’un tel désir, et sans jamais que Tolstoï ne le dise explicitement.

Elle tourna aussi la tête au même moment. Ses yeux gris et brillants, qui semblaient noirs à cause des sourcils très épais, s’arrêtèrent amicalement et attentivement sur le visage de Vronskï, comme si elle l’eût reconnu, et ensuite se reportèrent vers la foule en mouvement comme y cherchant quelqu’un. Dans ce coup d’œil rapide, Vronskï remarqua l’animation retenue qui se peignait sur le visage de la jeune femme et dans ses yeux brillants, et le sourire à peine visible qui glissait sur ses lèvres rouges. Tout son être semblait déborder malgré elle, dans l’éclat de son regard et dans la joie de son sourire. Elle s’efforça d’atténuer le feu de son regard, mais il continua de briller à son insu, au fond du sourire imperceptible. (p. 90-91, partie 1, chap. XVIII)

 Madame Karénine se tenait debout, très droite, et ses yeux souriaient. […]
- Oui, nous avons tout le temps parlé, la comtesse [la mère de Vronskï] de son fils et moi du mien, dit Anna Karénine. De nouveau un sourire éclaira son visage, un sourire plein de tendresse.
- Entendre parler de moi a dû vous ennuyer, dit-il, lui renvoyant aussitôt la balle dans cet assaut de coquetterie.
Mais elle ne désirait évidemment pas continuer sur ce ton. Elle s’adressa à la vieille comtesse […]
- Adieu, chère amie, répondit la comtesse. Permettez-moi de baiser votre joli visage. Et laissez-moi vous dire tout simplement, comme une vieille, que je vous aime bien.
Si banale que fût cette phrase, madame Karénine sembla y croire et s’en réjouir. Elle rougit, se pencha un peu, tendit son visage aux lèvres de la vieille comtesse, se dressa de nouveau et, souriant toujours à la fois des yeux et des lèvres, elle tendit sa main à Vronskï. Il serra cette petite main et se réjouit, comme d’une faveur toute particulière, de la forte poignée de main qu’elle lui donna. Elle sortit d’un pas rapide. La légèreté de son allure offrait un singulier contraste avec ce qu’il y avait d’imposant dans toute sa personne.
- Charmante, dit la comtesse.
C’était également l’opinion de Vronskï. Il suivit des yeux la gracieuse silhouette jusqu’au moment où elle disparut. Et le sourire s’éteignit tout d’un coup sur le visage du jeune homme. (p. 92-93, Ibid.)

Elle sortait déjà la main de son manchon, pour saisir la poignée et remonter dans le wagon, quand la lumière vacillante du réverbère lui fut cachée par un personnage en capote militaire.
Elle se retourna et reconnut le visage de Vronskï. La main à la visière de sa casquette, il s’inclina devant elle, et lui demanda si elle n’avait besoin de rien, s’il ne pouvait lui être utile. Sans rien répondre, elle le regarda longtemps, fixement. Malgré l’ombre où il se tenait, elle vit, ou il lui sembla voir, l’expression de ce visage et de ces yeux.
C’était encore cette expression d’admiration respectueuse qui l’avait tant impressionnée la veille. Ces derniers jours, elle s’était dit plusieurs fois, et elle venait de se répéter encore quelques instants auparavant, que pour elle Vronskï était un jeune homme comme il en existe des centaines, tous semblables, que l’on rencontre partout ; et donc qu’elle ne se permettrait jamais de penser à lui. Mais, maintenant, au premier moment de cette rencontre, un sentiment de fierté joyeuse l’avait saisie. Il n’était pas nécessaire de demander pourquoi il était ici ; elle le savait aussi sûrement que s’il le lui eût dit : il était là pour être où elle était.
- Je ne savais pas que vous partiez aussi ? Pourquoi partez-vous ? dit-elle en baissant la main qui s’apprêtait à saisir la poignée de la portière. Le visage d’Anna exprima une joie et une animation des plus vives.
- Pourquoi je pars ? répéta-t-il, la regardant droit dans les yeux. Je pars pour être où vous êtes. Je ne puis faire autrement.
À ce moment le vent, comme s’il eût vaincu les obstacles, balaya la neige du toit des wagons ; une plaque de tôle détachée grinça ; vers l’avant, la locomotive poussa un sifflement lugubre et plaintif. Maintenant, à la jeune femme, toute l’horreur de la tourmente semblait belle. Vronskï avait prononcé juste les mots que désirait l’âme d’Anna, mais que redoutait sa raison.
Elle ne répondit rien. Il suivait sur son visage la lutte qui se passait en elle.
- Pardonnez-moi si mes paroles vous ont déplu, dit-il humblement.
Il parlait d’une voix timide et respectueuse, mais avec tant de franchise et de fermeté que, longtemps, elle ne put dire une parole.
- C’est mal ce que vous dites là, répondit-elle enfin. Si vous êtes un galant homme, je vous prie d’oublier ce que vous venez de me dire, comme je l’oublierai moi-même.
- Je n’oublierai jamais aucune de vos paroles, ni aucun de vos gestes… Je ne le puis.
- Assez ! Assez ! cria-t-elle, tâchant en vain de donner à son visage, qu’il considérait avidement, une expression sévère.
Saisissant de nouveau la poignée glacée de la portière, Anna gravit le marchepied et entra rapidement dans le couloir du compartiment. (p. 139 à 141, partie 1, chapitre XXX)

3/ Les personnages de Tolstoï sont complexes, contradictoires, comme le sont tous les êtres humains. D’aucuns disent que Tolstoï manque de profondeur, en le jugeant à cette aune défavorablement par rapport à son illustre contemporain, Dostoïevski. Au contraire, dans AK, certains personnages ne manquent pas de grandeur tragique, torturés par leur conscience, écartelés entre leurs désirs contradictoires : Anna bien sûr, prise entre son amour pour Vronskï et pour son fils Serge, et un personnage que n’eût sans doute pas renié Dostoïevski, le frère de Lévine, Nicolas, qui sombre dans la déchéance physique et morale, écartelé entre ses désirs charnels et son aspiration malgré tout profonde au bien, que seul Lévine parvient à percevoir et qui explique son amour malgré tout pour son frère aîné.

[…] nous sommes injustes envers Nicolas. Sans doute Prokofi, qui l’a vu avec sa pelisse déchirée, peut croire que c’est un homme perdu ; mais moi qui le connais autrement, qui ai sondé le fond de son âme, je sais que nous nous ressemblons. […] Lévine repassait dans sa tête les événements qu’il connaissait de la vie de son frère Nicolas. Il se rappelait comment, étant à l’Université et encore une année après l’avoir quittée, son frère, malgré les railleries de ses camarades, vivait en cénobite, observant strictement toutes les prescriptions de la religion, assistant aux services, pratiquant les jeûnes, évitant tous les plaisirs, fuyant surtout les femmes. Puis tout d’un coup, un revirement s’était produit en lui, il s’était mis à fréquenter les gens les plus vils, il s’était adonné à la débauche la plus crapuleuse. Lévine se rappelait aussi comment Nicolas, ayant emmené à la campagne un jeune garçon pour l’élever, l’avait un jour, dans un accès de fureur, tellement battu que les parents lui avaient fait un procès. […] Lévine se rappelait encore le procès honteux que Nicolas avait intenté à leur frère Serge Ivanitch, accusant celui-ci de ne pas lui avoir donné sa part de l’héritage maternel […] Tout cela était bas et honteux, mais Lévine ne voyait pas son frère sous un jour aussi noir que ceux qui, ne connaissant pas toute l’histoire de Nicolas, ignoraient son cœur. (p. 118-119, partie 1, chap. XXIV)

4/ La compassion de Tolstoï pour tous ses personnages. D’aucuns dénigrent Tolstoï en raison de sa misogynie notoire. Mais AK est un énième exemple démentant ceux qui assimilent hâtivement l’auteur et son œuvre dans un même moule : un brillant auteur est souvent dépassé, voire démenti, contredit par l’impératif de son art s’il est un artiste authentique. Ainsi il est clair que Tolstoï éprouve de la compassion pour Anna, bien qu’il réprouve sans doute son adultère en son for intérieur au vu de son destin tragique et de celui, plus clément, de Kitty et de Dolly dans leurs mariages respectifs, quoique cela soit à relativiser pour cette dernière au vu de son mari volage, insouciant, pour ne pas dire irresponsable eu égard de l’éducation de ses enfants en particulier. Le destin malheureux de Dolly, les souffrances qu’elle endure et que Tolstoï décrit avec tant de sympathie ne sont guère ce que l’on attendrait d’un soi-disant auteur misogyne.

Et Daria Alexandrovna, qui s’était promis une vie commode sinon tranquille à la campagne, sentit renaître l’espoir. Avec ses six enfants elle ne pouvait avoir un moment de repos : tantôt c’était l’un qui tombait malade, tantôt l’autre qui menaçait de le devenir ; il manquait quelque chose au troisième, le quatrième enfin faisait preuve d’un mauvais caractère, etc., etc. Rares étaient les périodes de calme véritable. Mais ces tracas et ces inquiétudes constituaient, pour Daria Alexandrovna, le seul bonheur possible. Privée de ces soucis, elle serait restée seule avec les tristes pensées que lui inspirait l’indifférence de son mari. En retour, et quelque pénibles que soient pour la mère la crainte des maladies, leur gravité et le chagrin causé par les mauvais penchants des enfants, ceux-ci compensaient déjà ces chagrins par de petites joies, si rares qu’on ne les remarquait pas plus que des paillettes d’or dans le sable. Dans les moments difficiles, Dolly n’avait conscience que de ses chagrins – le sable. À d’autres moments, l’or, c’est-à-dire la joie, lui redevenait perceptible. (p. 329, partie 3, chap. VII)

Daria Alexandrovna, dont la toilette s’était exceptionnellement prolongée, parut enfin, vêtue d’une robe de mousseline blanche, et monta en voiture.
C’était avec un soin particulier et avec une vive émotion qu’elle s’était coiffée et habillée ce jour-là. Autrefois, elle avait pris plaisir à se parer, heureuse d’être belle et de plaire ; mais plus elle vieillissait, plus il lui était désagréable de s’habiller : la toilette, selon elle, soulignait trop son âge. Toutefois ce matin-là elle s’était habillée avec un plaisir mêlé d’émotion, car elle ne se parait pas pour elle-même, mais pour faire honneur à ses charmants enfants, pour ne pas faire tache auprès d’eux ; et, jetant un dernier regard au miroir, elle s’en était allée satisfaite. Elle se trouvait belle, mais de cette beauté qu’elle recherchait, et qui était spécialement adaptée aux circonstances présentes. (p. 331, partie 3, chap. VIII)

Malgré la peine qu’il fallait prendre pour s’occuper de tous les enfants et pour calmer leurs ébats, malgré toute l’attention qu’il fallait pour ne pas emmêler tous ces bas, ces pantalons, ces petits souliers et pour délier et rattacher les rubans et les boutons, Daria Alexandrovna qui, personnellement, aimait beaucoup se baigner et considérait que cet exercice était très favorable à la santé des enfants, n’éprouvait jamais autant de plaisir qu’en allant au bain avec eux tous. Tenir toutes ces petites jambes potelées pour les chausser, prendre dans les bras et plonger dans l’eau ces petits corps, écouter leurs cris tantôt joyeux, tantôt effrayés, voir les mignons visages, aux yeux grands ouverts, tour à tour effarés ou amusés, de ces chérubins qui se jetaient de l’eau les uns aux autres, tout cela était pour la mère de ce petit monde un très grand plaisir. (p. 333, ibid.)

5/ Sa manière d’écrire des scènes où le non-dit prime sur le dit. Tolstoï est l’un de ceux qui ont le mieux compris que les regards, les silences, certains gestes ont beaucoup plus d’importance que ce qu’un personnage dit ou fait explicitement. Le livre regorge de telles scènes en apparence anodines où tout passe par le regard, où les personnages se comprennent miraculeusement, comme si leurs âmes communiquaient directement l’une avec l’autre (la scène des fiançailles de Lévine/Kitty, où à la craie, ils parviennent à se comprendre en écrivant la première lettre de chaque mot qu’ils voudraient prononcer) ; ou à l’inverse, ne parviennent guère à parler franchement l’un avec l’autre, voire se méprennent réciproquement, avec des conséquences plus ou moins graves, ou rendant la scène d’autant plus émouvante, telle la scène d’adieux entre Lévine et Nicolas lors de la visite de ce dernier dans ce domaine, avant-dernière entrevue entre les frères avant la mort de ce dernier.
C’est je pense une des singularités de l’écriture de Tolstoï, que je ne retrouve nulle part de manière aussi systématique et étendue. J’ai cependant noté qu’Edith Wharton utilise aussi cette manière d’écrire dans ses romans, quoique de manière moins significative que Tolstoï (voir ma note sur The House of Mirth)

Lévine se sentait coupable, mais que pouvait-il faire à cela ? Il sentait que, s’il leur avait été possible de s’expliquer franchement et sans feinte, s’il leur avait été donné de se communiquer librement leurs sentiments et leurs pensées, ils n’auraient redouté ni l’un ni l’autre de se regarder droit dans les yeux, et leur conversation eût été celle-ci : « Tu vas mourir ! Tu vas mourir ! » aurait dit Constantin, à quoi Nicolas aurait répondu sans hésitation : « Je le sais, je vais mourir. Et j’ai peur, j’ai horriblement peur ! » C’était là tout ce qu’ils se seraient dit s’ils avait pu se parler à cœur ouvert. Mais une telle franchise n’était pas compatible avec les exigences de la vie […]
Nicolas avait déjà fait tous ses préparatifs de départ quand Constantin vint le trouver de nouveau, et, d’un ton un peu forcé, le pria de l’excuser si lui, Constantin, avait pu l’offenser de quelque manière.
- Ah, de la magnanimité maintenant ! dit Nicolas en souriant. Si tu tiens absolument à avoir raison, je ne te refuserai pas cette satisfaction. Soit ! Tu as raison. Cela ne m’empêchera pas de partir.
Toutefois, au moment du départ, Nicolas, en embrassant son frère, dit d’une voix étrangement grave, en le regardant :
« Voyons, Kostia, ne m’en veuille pas ! » Et sa voix tremblait.
Ce furent les seules paroles sincères qu’ils échangèrent. Elles signifiaient clairement pour Lévine : « Tu vois et tu sais que je me meurs et que peut-être nous ne nous reverrons plus. »
Des larmes jaillirent de ses yeux. Il embrassa de nouveau son frère, mais ne trouva rien à lui dire. (p. 443 et 445, partie 3, chap. XXXII)

Ajoutons à cela le chapitre XXXII de la partie 5 (p. 668 à 670) dans son intégralité, au cours duquel Anna se montre froide pour tester l'amour de Vronskï, le mettant au défi de l'accompagner à l'opéra pour défier l'hypocrisie de l'aristocratie russe.


6/ Nos émotions, nos aspirations les plus universelles, y sont abordées, faisant d’AK un roman total qui embrasse l'intégralité du spectre des émotions humaines, de la joie la plus extatique au désespoir le plus profond : notre besoin d’amour, l’humiliation du rejet, l’exubérance d’un amour naissant ou comblé, les complications ou la mort progressive de l’amour, notre volonté de devenir meilleur corrélée à notre incapacité de changer foncièrement, notre angoisse et désespoir face à la mort etc. Toutes les émotions essentielles de la vie sont abordées et approfondies avec minutie, et communiquées au lecteur grâce au sens du détail réaliste de Tolstoï et surtout, sa capacité à relier l’environnement aux sentiments du personnage. Ce sont les passages les plus poétiques et poignants du roman, Tolstoï étant au niveau des métaphores moins lyriques qu’un Proust ou un Nabokov dans l’ensemble, bien que certaines se détachent, mais elles ont une fonction surtout éthique avant d’être artistique comme l’avait observé Nabokov**. Ci-dessous, Lévine redécouvrant son amour pour Kitty, après lui en avoir longtemps voulu de l'avoir refusé au cours de sa première demande en mariage :

Tout frissonnant de froid, Lévine marchait rapidement, les yeux baissés. « Tiens, se dit-il tout à coup, une voiture qui vient par ici ! » On entendit un bruit de grelots. Il leva la tête. À quarante pas de lui, sur la grand-route qu’il suivait, une voiture attelée de quatre chevaux venait à sa rencontre. Sans songer aux voyageurs qu’elle pouvait contenir, il la regarda distraitement passer.
Dans un coin dormait une vieille dame : près de la portière était assise une jeune fille qui, visiblement, venait de s’éveiller et tenait les rubans de son bonnet blanc. Calme et pensive, sa physionomie reflétait cette vie élégante et compliquée, qui était si étrangère à Lévine. La jeune fille regardait les lueurs empourprées de l’aurore.
Au moment où la vision allait disparaître, un regard limpide se porta sur lui. Ce fut comme un éclair. Il l’avait reconnue… Une joie mêlée de stupeur illumina son visage.
Il ne pouvait se tromper : ces yeux étaient uniques au monde. Une seule créature sur terre représentait pour lui l’univers entier et constituait en même temps la seule raison d’être de sa vie. Oui, c’était bien elle, c’était Kitty ! Il comprit que la jeune princesse se rendait de la station du chemin de fer à Ergouchovo ; et, subitement, toutes ses émotions de la nuit, toutes les résolutions que Lévine avait prises s’évanouirent comme un rêve. Il chassa avec horreur la pensée, qu’il avait eue, d’épouser une paysanne. Là, dans cette voiture qui s’éloignait rapidement et allait disparaître au prochain tournant, là seulement était la véritable solution de ce problème de la vie qui, ces derniers temps, n’avait cessé de le hanter.
Elle ne regardait plus à la portière ; le bruit des roues avait cessé de se faire entendre ; le son des grelots arrivait à peine jusqu’à Lévine, les aboiements des chiens lui indiquaient que la voiture traversait le village. Et lui, seul, étranger à tout, marchait, abandonné, sur la grand-route déserte.
Il regarda le ciel, espérant y trouver la coquille nacrée qu’il avait admirée quelques minutes auparavant et qui représentait pour lui la marche de ses idées et de ses sentiments pendant cette nuit : dans le firmament, plus rien ne rappelait la coquille. Là-haut, à des hauteurs inaccessibles, s’était accomplie la transformation mystérieuse ; il n’y avait plus trace de nacre ; un vaste tapis de petits nuages moutonneux couvrait presque la moitié du ciel. Celui-ci, maintenant d’un bleu plus clair, répondait avec la même douceur, mais aussi avec le même mystère, au regard qui l’interrogeait.
« Non, se dit Lévine, quelque belle que soit cette vie simple et laborieuse dont j’ai rêvé, là n’est pas ma destinée. C’est elle que j’aime. » (p. 348-349, partie 2, chap. XII)

7/ En corrélation avec le point précédent, tous les événements fondamentaux de la vie sont donc abordés : personne n’a écrit dans la littérature une scène de fiançailles, une scène de mariage et une scène de naissance aussi bien que Tolstoï, pour retracer les différentes étapes essentielles du couple Lévine/Kitty. De plus, Tolstoï est aussi l’auteur qui aborde la mort de la manière la plus saisissante, comme l’atteste la scène de la mort du frère de Lévine, Nicolas dans le présent roman. On pense aussi à d’autres morts mémorables dans le reste de son œuvre, comme celle du prince André ou du frère de Natasha, Nicolas, dans Guerre et Paix ; celle d’Ivan Ilitch dans la nouvelle du même nom ; ou même celle de personnages en apparence moins nobles, comme dans Hadji Mourat (voir ma note sur cette nouvelle avec la mort du soldat Pierrot Avdéev) ; de la naissance de l’enfant de Kitty et Lévine, à la mort de Nicolas Lévine ou d’Anna, en passant par les fiançailles puis le mariage Kitty-Lévine, la déréliction du mariage d’Anna avec son mari, puis avec Vronskï, la demande en mariage avortée de Serge Ivanovitch à Varenka…

La vue de son frère mort réveilla en l’âme de Lévine toute l’horreur qu’il avait ressentie devant l’étrangeté, la proximité et le caractère inévitable de la mort, pendant cette nuit d’automne où son frère était venu le voir. Ce sentiment était encore plus vif qu’auparavant ; encore plus qu’alors, Lévine se sentait incapable de comprendre le sens de la mort, et plus horrible lui en apparaissait la fatalité. Cependant la présence de sa femme l’empêcha de tomber dans le désespoir ; car, malgré ses terreurs, il éprouvait le besoin de vivre et d’aimer. Il sentait que l’amour le sauvait du désespoir ; et cet amour, sous l’influence du désespoir, devenait encore plus grand et plus pur. À peine eut-il vu s’accomplir ce mystère de la mort, qui restait insondable pour lui, qu’un autre mystère, celui de l’amour et de la vie, lui apparut. Le docteur confirma ses suppositions sur l’état de Kitty : la jeune femme était enceinte. (p. 625-626, partie 5, chap. XX)

8/ Une vision assez déterministe, mais réaliste, de l’individu. Lévine tout au long du roman aspire à changer, à être meilleur, mais échoue systématiquement : sa nature timide, revêche en société, son irascibilité sont plus fortes que lui malgré sa sincère volonté de changer. Stépan éprouve d’entrée de roman des remords pour avoir causé de grandes souffrances à Dolly de par son infidélité, mais il demeure toujours aussi volage à la fin du roman et conserve ses manières de célibataire, qui font de lui un piètre mari et père. Le mari d’Anna, après un pardon sincère lié à l’accouchement difficile d’Anna, retombe dans un comportement dur et intransigeant. Kitty ne peut changer à l’image de son amie Varenka lors de son séjour à l’étranger malgré sa volonté.
Néanmoins, cette aspiration au mieux, au meilleur, est un trait humain qui permet de nuancer la mauvaise opinion que l’on peut avoir des personnages, en particulier les maris d’Anna ou de Dolly. Et bien que Lévine n’ait extérieurement pas changé à la fin du roman dans son comportement avec autrui, nous sentons néanmoins que quelque chose a changé, au niveau de son être intérieur, de son âme, et c’est cela qui rend la fin du roman si réussie, malgré certains détracteurs arguant que le roman tombe dans une certaine torpeur après la mort d’Anna qui conclut la septième et avant-dernière partie du roman. C’est également le cas pour Kitty qui malgré son impuissance à changer profondément, a mûri, changé malgré tout à l’issue de son séjour à l’étranger.

Elle ne renonçait pas à tout ce qu’elle avait appris, mais elle comprenait qu’elle se trompait en pensant qu’elle pouvait devenir ce qu’elle avait rêvé d’être. Elle croyait s’éveiller. Elle mesurait toute la difficulté qu’il y a à se tenir sincèrement, sans vanité, à la hauteur où elle voulait s’élever. En outre, elle sentait toute la tristesse de ce monde de souffrances, de maladies, d’agonies. Elle trouvait pénibles les efforts qu’elle s’imposait pour aimer ce monde, et elle aspirait à se retrouver au plus vite à l’air frais, en Russie, à Ergouchovo, où elle avait appris par une lettre que sa sœur Dolly était déjà installée avec ses enfants. […]
Kitty revint en Russie, guérie. Elle n’était ni aussi insouciant ni aussi joyeuse qu’auparavant, mais elle était en paix. Les chagrins de Moscou n’étaient plus pour elle qu’un souvenir. (p. 297, partie 2, chap. XXXV)

C’est un mystère nécessaire, important pour moi seul et inexprimable par des paroles.
« Ce nouveau sentiment, de même que le sentiment paternel, ne m’a pas changé, ne m’a pas rendu plus heureux, ne m’a pas éclairé d’un coup, ainsi que je l’avais cru ; il n’y eut aussi aucune surprise. La foi, le manque de foi, je ne sais ce que c’est ; mais ce sentiment est entré imperceptiblement dans mon âme, par la souffrance, et s’y est installé solidement.
« Je me fâcherai encore contre le cocher Ivan ; je continuerai à discuter bien ou mal à propos ; il y aura toujours le même mur entre les profondeurs de mon âme et les autres, même ma femme ; je l’accuserai de la même façon pour une crainte qui m’a effleuré, et je le regretterai ; je continuerai à ne pas comprendre par la raison pourquoi je prie, mais je prierai quand même. Cependant, maintenant ma vie, toute ma vie, indépendamment de tout ce qui peut m’arriver à n’importe quel moment, non seulement n’est plus dénuée de sens comme autrefois, mais a acquis un sens indiscutable, celui du bien que j’y puis faire entrer. » (excipit du roman)

9/ Structure et cohérence. AK apparaît encore plus à la relecture comme une œuvre pensée et écrite avec beaucoup de cohérence : c’est bien sûr, pour l’exemple le plus célèbre, l’entrée en scène d’Anna qui fait écho à sa mort prochaine à la gare de Moscou. Nabokov, dans sa minutie et pertinence habituelle, déconstruit les rêves communs de Vronskï et d’Anna et les rattache subtilement aux détails de leurs premières rencontres***. Les exemples témoignant de la cohérence du roman sont innombrables, je reviendra pour ma part en particulier sur la scène de la course de cheval, durant laquelle la manière dont Vronskï provoque la mort de sa monture, qui préfigure symboliquement le destin tragique d’Anna, ou les aspirations respectives d'Anna et de Kitty devant le futur qui les attend au moment de leur mariage.
Les trois couples principaux se font miroir et écho l’un avec l’autre : Anna/Vronskï ; Kitty/Lévine ; Dolly/Stépan. Tous trois proposent une vision de l’amour et du mariage qui se complètent et se répondent, en en donnant une image large et complexe.

Il passa le fossé presque sans le remarquer ; la jument l’avait franchi comme un oiseau. Mais, à ce même moment, Vronskï constata avec horreur, sans en comprendre la cause, qu’il n’avait pas suivi le mouvement du cheval et qu’il venait de faire un mouvement impardonnable, en s’affaissant sur la selle. Tout d’un coup, sa situation changea. Il eut la sensation d’une chose affreuse qui lui arrivait. Avant qu’il ne l’eût comprise, les pieds blancs de l’autre cheval apparurent près de lui. Makhotine au galop le dépassait. Vronskï tomba, un de ses pieds toucha le sol, sa monture s’abattit par-dessus lui. À peine eut-il vivement dégagé sa jambe que l’animal roulait de côté en râlant péniblement, et en faisant, pour se relever, de vains efforts, agitant son cou fin et ruisselant. Comme un oiseau blessé, la jument se débattait sur le sol, près des jambes de son cavalier. Le mouvement maladroit fait par Vronskï avait brisé les reins de la bête ; mais le jeune officier ne comprit cela que beaucoup plus tard ; maintenant il ne voyait qu’une chose : que Makhotine s’éloignait rapidement et que lui, Vronskï, était seul, immobile sur le sol boueux. Devant lui gisait Froufrou, qui respirait lourdement, la tête penchée, en le regardant d’un œil suppliant. Vronskï ne comprenait pas encore ce qui était arrivé. Il tira sa jument par la bride ; de nouveau elle se débattit, comme un poisson dans un filet, en faisant craquer les ailes de la selle. Elle dégagea ses jambes de devant, mais n’eut pas la force de soulever sa croupe, eut encore une convulsion et de nouveau retomba sur le flanc.
Vronskï, le visage défiguré par la colère, pâle, les lèvres tremblantes, donna un coup de talon dans le ventre du cheval et se remit à tirer sur les guides. Mais l’animal ne bougea pas. Tournant seulement la tête vers son maître, il le regarda, comme pour lui parler.
- Ah ! ah ! ah ! hurla Vronskï en se prenant la tête. Qu’ai-je fait ! s’écria-t-il. La course perdue, et par une faute honteuse, impardonnable ! Et cette malheureuse bête, si courageuse : la voilà perdue ! Ah ! qu’ai-je fait !
[…] Il se tourna et, sans ramasser le bonnet de police, qui lui était glissé de la tête, il quitta l’hippodrome, ne sachant pas lui-même où il allait. Il se sentait malheureux, pour la première fois de sa vie. Le chagrin qu’il éprouvait était d’autant plus vif que tout était de sa faute. (p. 254-255, partie 2, chap. XXV)

Quel heureux âge ! continua Anna. Je vois encore ce brouillard bleu, semblable à celui qui couvre les montagnes de la Suisse, ce brouillard au travers duquel on voit toute chose à cette heureuse époque qui suit l’enfance. Je me souviens de ce vaste horizon plein de gaieté et de bonheur, de ce chemin qui se resserre de plus en plus, et dans lequel on s’engage avec une joie mêlée de crainte, bien qu’il semble rempli de clarté et de charme… Qui n’a pas passé par là ?
Kitty sourit en silence : « Elle aussi a donc passé par là ? Comme je voudrais connaître toute sa vie ! » pensait-elle, se rappelant combien était peu poétique Alexis Alexandrovitch, le mari. (p. 104-105, partie 1, chap. XX)

Il [Lévine] tourna la tête, rencontra le regard de Kitty, et de l’expression de ce regard il conclut qu’elle comprenait tout comme lui. Mais il se trompait. Elle ne comprenait point les paroles rituelles et même ne les écoutait pas ; durant toute la cérémonie, elle ne devait rien écouter ni rien comprendre, tant était fort l’unique sentiment qui remplissait son âme et qui augmentait de plus en plus. Elle ressentait la joie intense de voir enfin s’accomplir ce qui, pendant plus d’un mois, avait fait successivement le bonheur et le tourment de son âme.
Depuis ce jour où, vêtue de sa robe brune, elle s’était, dans le salon de leur maison de l’Arbarte, approchée de Lévine en silence et lui avait donné son consentement, depuis ce jour, depuis cette heure, elle avait arraché de son âme tout le passé, pour entrer dans une existence nouvelle, inconnue, bien qu’en apparence sa vie d’autrefois parût continuer. Ces six semaines avaient été pour elle une période à la fois heureuse et tourmentée ; toute sa vie, tous ses désirs, tous ses espoirs s’étaient concentrés sur ce seul homme, qu’elle ne comprenait pas bien, vers lequel la poussait un sentiment qu’elle comprenait moins encore, et tantôt l’attirant vers lui, tantôt l’en éloignant. Cependant elle continuait de mener sa vie ancienne, et elle constatait avec terreur qu’il lui était venu une indifférence invincible pour tout son passé, pour les choses, les habitudes, les gens qu’elle avait aimés et qui l’aimaient, pour son père, si bon, et qu’autrefois elle chérissait tant. Elle était effrayée de cette indifférence, mais aussi elle s’en réjouissait, en songeant à ce qui la causait. Elle ne pouvait rien désirer, rien se représenter en dehors de la vie qu’elle allait mener avec cet homme. Mais cette nouvelle vie n’avait pas encore commencé et elle ne pouvait même pas s’en faire une idée.
C’était l’attente, mêlée de crainte et de joie, du nouveau et de l’inconnu. Mais cette attente de l’inconnu, ce remords de ne pas regretter le passé, allaient avoir une fin. La nouvelle vie allait commencer ; et en présence de cet inconnu, elle ne pouvait s’empêcher de trembler ; attendue depuis six semaines, l’heure décisive avait sonné, et ce jour, pour Kitty, n’était que la consécration de ce qui s’était alors accompli en son âme. (p. 565-566, partie 5, chap. IV)

10/ L’utilisation de points de vue originaux participant du procédé de défamiliarisation chère aux formalistes russes. Tolstoï déroge habilement de la narration omnisciente dans certaines scènes-clés qui eussent sans doute eu un impact moins marquant s’il en avait été autrement. Les scènes les plus marquantes à cet égard sont celles où le bal scellant l’amour d’Anna et de Vronskï est perçu à travers les yeux de Kitty, se rendant progressivement compte que ses fiançailles espérées avec Vronskï n’ont plus lieu d’être. Ou encore un chapitre nous montrant comment Serge, le fils d’Anna, vit sa séparation avec sa mère, et comment de brèves retrouvailles avec elle ont lieu, rendant leur séparation rapide et forcée plus poignante. Enfin, la dernière journée d’Anna, entièrement perçue à travers ses yeux, avec l’utilisation déjà de la technique du stream of consciousness, constitue un moment de littérature inoubliable, où tout concourt à nourrir le désespoir et le pessimisme d’Anna, même son amie Dolly à qui elle rend une brève visite qui ne fait qu’aggraver sa détresse, jusqu’à son suicide tragique.

 

Bref comparatif entre AK et Le Rêve dans le pavillon rouge.

        Pour toutes les raisons susmentionnées, AK est sans doute mon roman préféré, avec Le Rêve dans le pavillon rouge de Cao Xueqin. Les deux romans partagent cette même impression d’illusion de la vie même, ainsi qu’une même compassion pour tous leurs personnages tous bien individualisés et uniques.
Si le roman de Tolstoï est supérieur au grand roman chinois par la manière unique dont Tolstoï parvient à approfondir ses personnages, en particulier leurs pensées conscientes et inconscientes, et la manière dont ils vivent les événements fondamentaux de toute existence humaine, celui de Cao Xueqin est supérieur dans sa manière d’avoir des personnages de tous horizons (en particulier les servants représentant la classe inférieure) qui loin d’être des personnages secondaires (comme dans AK) sont parfois au cœur même de l’intrigue. Le Rêve dans le pavillon rouge propose sans doute, en un seul roman, la plus grande quantité mais surtout diversité de personnages romanesques, tous individualisés et reconnaissables. Le roman chinois se distingue aussi par son humour et son exubérance plus présents et communicatifs (les scènes de concours poétique, d’espièglerie, de farces jouées ou de beuverie entre autres) et son originalité inattendue et renouvelée : les scènes de caractérisation des personnages à travers les poèmes qu’ils composent, des scènes oniriques, surnaturelles, l’introduction constante de nouveaux personnages etc. tandis que Tolstoï joue certes admirablement sur ses qualités d’approfondissement et de détail, mais demeure souvent dans le même registre.
Le roman parfait à mes yeux serait un mélange entre les qualités de romancier de Tolstoï et de Cao Xueqin, d’où ma difficulté à les départager au regard de leurs qualités respectives, certaines certes communes, mais d’autres propres et uniques à leur auteur…
Je renvoie, pour plus de détail, à ma note sur Le Rêve dans le pavillon rouge.

* V. Nabokov, Littératures, coll. Bouquins, éd. Robert Laffont, 2010, p. 700-701.
** Ibid., p. 769 à 771.
*** Ibid., p. 711 à 719, puis p. 737 à 744.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Ajouter un commentaire